La République de Seine et Marne consacre un article à la pétition que nous avons lancée pour demander que s’arrête la folle destruction de la nature à #Melun. Plus de 50% des espaces de nature que comptait la ville en 2014 ont été détruits par la majorité municipale qui les a sacrifiés sur l’autel des ambitions nationales de notre maire. Pour @LouisVogel, notre ville n’a jamais été qu’un rite de passage obligatoire sur le chemin d’une ascension politique qu’il voudrait pouvoir consacrer sous les ors d’un ministère de la République. Qu’est-ce que la bourgeoisie cossue des beaux quartiers de l’ouest parisien viendrait faire ici sinon ?
500 signatures récoltées en deux semaines auront permis que notre hebdomadaire local se penche sur presque 3 pages sur le sujet de la nature et l’enjeu de sa protection pour les habitant·es de #Melun.
C’est une bonne chose.
Pourtant, il suffit de parcourir les titres des articles de la section « Melun et ses environs » pour comprendre ce qui se joue : « Des mesures concrètes pour rendre la ville à la nature », « 54 km de liaisons douces », « 10400 arbres », « La ferme va renaître de ses cendres », « Melun joue ses fleurs au concours » (je n’ai pris que les plus significatifs) et enfin sur la troisième et dernière page : « L’urbanisation inquiète l’opposition ».
Là, toute personne censée qui ne connait pas la ville se dit : « bah, j’comprends pas ? »
D’un côté la propagande du maire et de sa majorité, de l’autre la parole de l’opposition. Deux discours parfaitement contradictoires. Qui dit vrai ?
Départager le vrai du faux, informer sur la base de données vérifiées, ne pas qualifier d’article ce qui relève du publi-reportage, n’est-ce pas normalement le travail du journaliste ?
Parmi les 10 devoirs qui incombent aux journalistes selon la « Déclaration des devoirs et des droits des journalistes », signée en 1971 à Munich, on lit : « Ne jamais confondre le métier de journaliste avec celui du publicitaire ou du propagandiste » en vertu du « droit que le public a de connaître la vérité ».
Nous savons bien que pour que ces principes déontologiques guident effectivement le travail des journalistes il faut au moins deux conditions : d’une part que le journaliste déchausse ses « lunettes » (comme disait Bourdieu qui l’empruntait à Descartes), ce qui signifie soit capable de critiquer ses propres catégories d’analyse et de perception, et, d’autre part, que ses conditions de travail lui garantissent la liberté nécessaire à l’exercice de son métier.
Les lecteurs et lectrices jugeront par elleux-mêmes :
Le premier article est consacré au parc Faucigny-Lucinge. 10,6 hectares sur les 155 ha de nature (parcs, friches, champs, bois) que comptait la ville en 2014.
C’est bien de vouloir le préserver mais ici c’est surtout l’arbre qui cache la forêt détruite.
Le deuxième, nous parle des 10400 arbres qui sont encore plantés et vivants à Melun mais oublie de nous dire combien en comptaient les 56 ha du bois de Montaigu qui ont été détruits pour construire un « écoquartier » (selon la terminologie des spéculateurs immobiliers).
« Dès que nous coupons un arbres, il est compensé immédiatement » déclare le directeur des espaces verts de Melun. Compensé ? Cela signifie que la ville de Melun (sa majorité) a acheté par exemple une parcelle de bois existant à La Rochette afin de « compenser » les arbres détruits sur le territoire communal. Le mécanisme de la compensation, qui permet entre autre aux pays riches d’acheter des droits à polluer aux pays pauvres très faibles émetteurs de gaz à effet de serre, est dénoncé par tou·tes les écologistes dignes de ce nom. Mais le journaliste n’aura pas pris soin d’expliciter de quoi il s’agissait. Le maire Louis Vogel déclare qu’il y a plus d’arbres aujourd’hui qu’hier. Là encore l’information ne donne lieu à aucune vérification.
Le troisième article revient sur les 54 km de piste cyclable qui relieront (un jour) Melun à Maincy et au château de Vaux-Le-Vicomte. Parce que c’est bien de cela qu’il s’agit. Les délibérations et documents du conseil communautaire par lesquels l’Agglomération Melun-Val de Seine a décidé de s’engager et solliciter le concours de l’Etat dans un projet de coulée verte entre la place Saint-Jean et le château de Vaux-Le-Vicomte ne tournaient pas tant autour du pot. Coût global estimé de l’opération 1 960 000 €. J’ai demandé si la majorité communautaire avait au moins négocié avec les propriétaires privés du château construit par Fouquet un tarif préférentiel pour les habitant·es de l’Agglomération. Mais non. Nous dépensons de l’argent pour le développement d’un bien qui n’appartient pas à la collectivité et pour la visite duquel ne nous ne bénéficierons d’aucun avantage. Nous paierons donc 16,90€ par personne (-2€ pour le tarif réduit) que nous ayons financé la piste cyclable qui nous y amène ou pas.
Nous, les écologistes sociaux, voulons des pistes cyclables pour la vie quotidienne, pour aller au travail, pour emmener nos enfants à l’école, pour aller faire nos courses. Nous ne voulons pas d’une piste cyclable pour faire plaisir à la fraction de la population de notre ville qui a le loisir de payer 16,90€ par personne pour aller visiter un château privé avec lequel la majorité communautaire n’est même pas capable de négocier un partenariat qui en démocratiserait l’accès. Nous ne voulons pas de ce greenwashing particulièrement sordide parce que fondamentalement injuste socialement.
Continuons.
Le quatrième article est consacré à la ferme de Montaigu, abandonnée par la commune pendant des années. Pauvre bâtisse éventrée et incendiée jusqu’à ce que le maire s’en saisisse, apeuré par les critiques que nous formulons et l’écho grandissant qu’elles reçoivent parmi la population de notre ville, nouvel objet de sa propagande pour « plus de vert » à Melun. Louis Vogel reprend d’ailleurs une des idées que nous défendions dans notre programme de 2014 mais en la dénaturant. Là où nous voulions créer une ceinture maraîchère autour de Melun et installer plus de 100 emplois, notre petit Macron local veut créer un lieu de vente en circuit court.
C’est quoi la différence entre « circuit court » et « agriculture locale » ?
Il aurait pourtant suffi au journaliste de jeter un oeil à la définition qu’en donne wikipedia : « Le circuit est dit « court » lorsqu’il y a, au maximum, un intermédiaire : il n’y a pas de notion géographique, le producteur peut être proche ou non du consommateur. On parle de relocalisation lorsque le producteur se rapproche géographiquement du consommateur, indépendamment des intermédiaires. »
Quand nous les écologistes sociaux voulons relocaliser les activités économiques, créer de l’emploi ici et garantir l’accès à des produits sains à tou·tes, les marcheurs en chaussures vertes parlent de circuits courts. Deux projets, deux visions antagonistes du monde que nous voulons construire.
Enfin, le cinquième article porte sur notre pétition, celle qui motive tout le reste mais arrive en dernier comme pour s’excuser (quand même) d’y faire écho.
Sous-titre et légende (qui sont rarement écrits par le journaliste qui signe l’article) prétendent que j’ai lancé une pétition. Réduisant au passage l’initiative d’un groupe citoyen Bien vivre à Melun formé d’une quarantaine de personnes, dont une vingtaine d’actives, à une seule personne, élue d’opposition.
Là encore l’emploi du conditionnel « sensibiliser les habitants sur la préservation des zones naturelles à Melun, qui auraient diminué de 50 % depuis 2014 » remplace le travail de vérification et de confrontation de l’information.
Pourtant, à propos des arbres que la mairie prétend avoir replantés, un petit travail d’enquête aurait facilement permis de montrer que, contrairement à ce qu’elle affirme, elle ne s’est pas encore acquittée de ses obligations en la matière. Claude Bourquard, élu avec moi et membre du collectif Bien Vivre à Melun, ne cesse de rappeler le maire à ses obligations.
Tant pis, il nous faudra bien nous contenter de ça et compter sur l’intelligence des gens qui sauront faire la différence entre le greenwashing de la macronie locale et un vrai projet politique écologiste pour la justice sociale et le droit de tou·tes à vivre dignement dans un environnement qui préserve les conditions de la vie humaine.