Le retour du C5, épisode 1.
« Je suis convaincu qu’il faudra faire une démonstration de force pour faire avancer le projet de la voie de contournement (de Melun) C5 ». Non, ce n’est pas un militant extrémiste qui a prononcé ces paroles vindicatives en 1998, mais Gérard Millet alors adjoint et futur maire de Melun. « Ridicule », lui répondront René André maire du Mée-sur-Seine et Jean-Claude Mignon maire de Dammarie-lès-Lys. Pour notre part, nous pensons qu’il faudra faire une démonstration de force pour faire reculer le projet de la voie de contournement de Melun C5. Faudra-t-il se résigner à instituer une zone à défendre (ZAD) pour protéger le massif forestier de Bréviande et ses communes riveraines ? Quelle autre solution auraient les citoyens face à un projet dont les prémices datent du plan directeur intercommunal de 1959 et qui n’a jamais vu de mise en œuvre car inutile, inapproprié, couteux et environnementalement inepte, tout comme celui de l’autoroute A45 qui a été finalement abandonné. Et pourtant, il ressurgit telle la gorgone dans les lubies d’élus locaux, départementaux et régionaux irresponsables. Nous vous en conterons les différents épisodes dans les prochains articles.
Le retour du C5, épisode 2.
Depuis 1959, ce sont deux logiques qui vont pousser à la réalisation de la rocade C5. Tout d’abord celle de la ville de Melun qui souhaite avant tout un contournement de la ville pour éviter le trafic de transit en centre-ville sans trop se soucier de l’intérêt des communes voisines. Mais aussi celle de l’État, de la Région et du Département qui veulent réaliser une nouvelle rocade parallèle à la Francilienne en remplacement de la RN36 qui serait prolongée par le C5. C’est ce dernier projet qui apparaîtra dans la charte d’aménagement du département de Seine-et-Marne en 1991 et dans celle de la région Île-de-France à la même époque. Le projet est alors inscrit au schéma directeur d’Île-de-France. En avril 1994, un décret confirme la volonté de l’état et de la région de réaliser le C5. On ne parle plus d’un contournement de Melun, mais d’un axe de voies rapides reliant entre elles les autoroutes A4, A5 et A6. Les communes de Boissettes, Boissise-la-Bertrand, Boissise-le-Roi, Dammarie-lès-Lys, Pringy, Saint-Fargeau-Ponthierry, saint-Germain-Laxis, Le Mée-sur Seine et Vert-Saint-Denis s’y opposeront et demanderont que, si toutefois on leur imposait cette nouvelle infrastructure, elle soit enterrée dans son passage en milieu urbain et dans les espaces naturels.
Le retour du C5, épisode 3.
À la fin de 1998, la ville de Melun fait pression sur l’État, la Région, le Département et les communes voisines pour obtenir le C5. Le Département propose un nouveau projet quasi identique au C5. Mais finalement, le projet est abandonné ! Pour quelles raisons ? La première est son coût énorme si l’on veut satisfaire la demande des communes d’avoir un tracé en souterrain et un franchissement de la Seine de grande ampleur. Ni l’État, ni les collectivités territoriales ne sont prêts à l’assumer. La seconde se discute au sein des réunions techniques. Le risque est que le C5 devienne un parcours de délestage de la Francilienne qui, à peine bouclée, est déjà saturée en particulier par les poids lourds. On évoque même la possibilité que la circulation se développe au centre de l’agglomération melunaise pour éviter localement le C5. Les spécialistes savent très bien qu’une nouvelle infrastructure engendre son propre trafic sans réellement diminuer ceux qui lui sont parallèles. Enfin, la troisième raison est la protection du massif forestier de Bréviande, défendu par l’Association des Bois du Canton. Il accueille le week-end les très nombreux habitants et habitantes des quartiers populaires de Melun, du Mée-sur-Seine et de Sénart. Trop couteux, trop hasardeux, trop nuisible, on croit le C5 disparu. En fait, il figure toujours au schéma directeur de la région Île-de-France. Les exécutifs régionaux de droite comme de gauche y ont veillé.
Le retour du C5, épisode 4.
Les époques changent, mais les solutions obsolètes sont toujours l’apanage de nos élus conservateurs, de droite comme de gauche. Le centre-ville de Melun est saturé et très fortement pollué. La saturation gagne l’ensemble de l’agglomération à certaines heures. La solution logique serait de tout faire pour diminuer la circulation et non créer de nouvelles routes pour l’augmenter. Fort de sa proximité politique avec la Présidente de la région, Valérie Pécresse, Louis Vogel, maire de Melun et Président de l’agglomération Melun–Val-de-Seine va obtenir l’inscription du C5 au plan anti-bouchons porté par la majorité régionale. La vieille recette, qui ne diminuera, au mieux, que de 10 % le trafic au centre de l’agglomération et pour quelques années seulement est remise sur le feu alors que d’autres solutions sont proposées par les associations et par nous-mêmes. Sous le prétexte de contourner le nouvel écoquartier de Melun, un premier tronçon est en cours de réalisation. Des milliers d’arbres sont supprimés ramenant le bilan environnemental de l’écoquartier à un niveau très mauvais. Nous n’avons pas manqué de questionner à plusieurs reprises le maire de Melun. Sa réponse se résume à « une étude est en cours ! ». Mais, la concertation ne serait-elle qu’une étape obligée et fastidieuse dans un projet déjà bouclé pour lequel aucune concession ne sera possible ?
Départ précipité du Tzen et retour en fanfare du C5, fin provisoire.
Si la question de l’environnement, des nuisances pour les riverains et de la concertation est bien la dernière préoccupation des élus locaux, départementaux et régionaux des majorités de droite, par contre celle du coût n’est toujours pas réglée. La solution toute trouvée est de ne pas réaliser le tronçon du Tzen prévu entre le nord de Melun et la gare. Elle est soutenue par notre députée Aude Luquet ainsi que Gilles Battail, maire de Dammarie-lès-Lys et conseiller régional, puis finalement annoncée par la majorité départementale de façon abrupte et peu respectueuse des élus melunais. La partie utile à Sénart sera bien réalisée, mais celle utile aux melunais et melunaises des quartiers populaires ne le sera pas. Et l’un des arguments sous-entendus est qu’il faut en priorité faire le C5 sans lequel il n’est pas possible de réaliser le tronçon sud du Tzen. La logique d’un tel raisonnement nous échappe !!! Nous ne manquerons pas de remercier notre députée de nous offrir plus de voitures et moins de transports collectifs. Bien que l’on veuille nous faire croire que le nouveau projet n’a rien à voir avec le C5, les acteurs, le tracé, l’ampleur et les objectifs sont les mêmes. Face à ce projet inutile, inapproprié, couteux et environnementalement inepte, porté par des élus conservateurs et passéistes, nous ne voyons pas comment il serait possible de le repousser définitivement autrement qu’en faisant du massif de Bréviande une zone à défendre (ZAD).
Claude Bourquard et Bénédicte Monville